Homélie du jeudi Saint 2025
Article mis en ligne le 19 avril 2025
dernière modification le 6 mai 2025

par BFCM
Jeudi Saint 2025

« Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau ». C’est ce que nous entendons depuis la dernière réforme liturgique lorsque le prêtre fait l’invitation à la communion.

Heureux d’abord, c’est une béatitude, c’est-à-dire une invitation au bonheur. Pour donner une réponse, il faut une décision, celle de vouloir vivre de ce bonheur comme étant un avant-goût de celui qu’on vivra lorsque nous serons rassemblés autour du Seigneur, à sa table, dans le Royaume.
Les invités. L’invitation est large, car les bras du Seigneur sont largement ouverts. Pensons à toutes les fois où nous sommes invités : les noces, un repas de famille, un repas d’amis, un anniversaire… La joie nous précède souvent… il y a du plaisir à se faire inviter… on s’y prépare… on se fait beau… tant à l’extérieur qu’à l’intérieur… On va chez quelqu’un… On apporte des fleurs, une bouteille de vin, un petit cadeau… c’est la coutume… c’est un peu de soi qu’on apporte… mais on va aussi beaucoup recevoir…
Les invités au repas. Être à table c’est pour partager un repas, mais c’est aussi pour échanger des paroles, des nouvelles… c’est prendre du temps pour mieux se connaître alors que la vie nous disperse et nous fait courir… C’est une pause nécessaire pour se refaire, pour se restaurer… autant l’esprit que notre corps et parfois notre cœur aussi. Si le prophète Isaïe dans une vision nous présente le paradis avec des images de banquet, c’est bien parce la table et le repas ont cette capacité de nous faire partager quelque chose de fort.
Repas de Noces. Les Noces évoquent le mariage, l’alliance. Notre histoire avec Dieu, n’est-ce pas une histoire d’amour ? Une histoire d’amour personnelle qui nous met en relation avec tous ceux qui vivent une même histoire avec lui… Une histoire qui date de la Création du Monde – à la veillée pascale nous l’évoquerons – Une histoire de salut parce que Dieu veut nous sauver du malheur. Une histoire d’alliance qui trouve son point culminant dans l’amour que le Christ nous a donné, dans l’amour que nous sommes maintenant appelés à vivre.
Les Noces de l’Agneau. C’est une expression du Livre de l’Apocalypse qui avec beaucoup d’images cosmiques et oniriques est le livre de l’espérance. Ce livre a été écrit pour conforter les premiers chrétiens affrontés à la persécution. Jésus est l’Agneau de Dieu, celui qui s’est sacrifié, c’est-à-dire qui a fait de sa vie quelque chose de sacré pour plaire à Dieu. Il n’a pas offert un animal comme dans l’Ancienne Alliance, il s’est offert lui-même dans une Alliance nouvelle et éternelle.

Alors bien sûr, une telle invitation peut nous donner le vertige. Qui suis-je pour aller communier à l’Agneau de Dieu ? Je ne me sens vraiment pas digne… Le seigneur ne nous inviterait pas s’il ne nous rendait pas capable de venir à lui. C’est pourquoi nous répondons : « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dit seulement une parole et je serai guéri ». Alors soyons assez humble pour écouter, entendre cette parole qui nous guérit, car ce n’est pas nous qui nous guérissons, qui nous rendons dignes. C’est en donnant sa vie que le Seigneur nous guérit. Et c’est en donnant notre vie à notre tour que nous lui deviendrons semblable, que nous ferons mémoire de lui.

Voilà pourquoi, en ce Jeudi Saint, nous faisons mémoire d’un autre geste de Jésus, celui du Lavement des pieds, un geste tout autant eucharistique que celui de la Cène, car il s’agit toujours de don. Communier au corps du Christ qui se donne à nous, c’est vouloir nous donner à nos frères et sœurs pour servir l’humanité. Servir l’humanité ça veut dire deux choses : faire connaître le Christ par ce qu’on appelle nos œuvres ou tout simplement notre attention au prochain, et deuxième chose, à ceux qui connaissent déjà le Christ les aider à accueillir l’amour de Dieu et le salut offert par lui.

La Cène et le lavement des pieds, deux beaux gestes, deux beaux signes ce soir pour notre vie présente. L’un appelle l’autre, l’autre appelle l’un. Peu importe la porte par laquelle on entre dans l’amour et le bonheur de Dieu. Il n’y a pas d’amour sans don de soi, il n’y a pas d’amour sans en reconnaître sa source qui est en Dieu. Car tout vient de lui pour y retourner.
Deux beaux gestes, deux beaux signes d’espérance aussi, car ils appellent, ils préfigurent ce que nous vivrons auprès du Seigneur : les noces éternelles où le Christ lui-même nous lavera les pieds et nous servira à table.
Que toutes nos communions ne s’en tiennent pas à des rites mais tracent la route sur laquelle le Seigneur se donne toujours à nous pour nous emmener vers le Royaume son Père. Et que sur cette route nous sachions aussi nous donner à nos frères comme lui se donne à nous.

Th.Piet