A la suite d’Ignace de Loyola, faire l’expérience de Dieu
Article mis en ligne le 4 septembre 2008
dernière modification le 17 décembre 2024

A l’Abbaye de Bellefontaine : une méditation de Louis Morandeau
Le 30 août 2008

Vivre une expérience intérieure …à la suite d’Ignace

Nous allons nous mettre, à la suite d’Ignace devant le mystère de l’Homme…devant aussi le mystère de Dieu…C’est l’histoire de la rencontre de moi-même avec mon Dieu…une histoire d’amour… Nous allons, ainsi, essayer de comprendre quelque chose de notre vie… et comment nous pouvons grandir en humanité, chacun(e) à notre allure… et comment nous pouvons aller chacun et chacune jusqu’au bout de nous mêmes en toute liberté, en partant d’où nous sommes (personne ne marche à la même allure (= pas la même histoire…pas la même sensibilité…etc…)…. Et aussi comment nous pouvons vivre, chacun(e) à notre manière, une plus grande communion avec Dieu…
Et tout cela pour essayer de répondre toujours mieux à l’Amour premier de Dieu pour chacun(e) de nous.

1- Evocation rapide du cheminement d’Ignace
(1491 - 1556) Fondateur de la "Compagnie de Jésus", plus connue sous le nom de "Jésuites". Il est l’auteur de la célèbre prière "Ame du Christ", popularisée dans les "Exercices Spirituels".
Ignace de Loyola naît au Pays basque espagnol en 1491, un an avant la découverte de l ’Amérique. Ignace vécut d’abord à la cour des Grands, puis se consacra à la vie militaire. Blessé au siège de Pampelune, il se convertit durant sa convalescence, ne brûlant que du désir de suivre les pas du Christ. Retiré à Manrèse, il y vécut une expérience spirituelle dont il a transposé l’essentiel dans le livre des Exercices Spirituels.
En lisant la vie des saints, il se dit : "pourquoi pas moi ?" et cherche comment servir Dieu et ses contemporains .
A 39 ans, 6 de ses amis dont François Xavier et lui partagent une même conviction : Dieu est présent au cœur de ce monde qu’il aime. Ils décident alors de se mettre ensemble au service du Christ et de partir là où l’Eglise, par l’intermédiaire du Pape, les enverra. Ignace, fondateur de cette "Compagnie de Jésus" reste à Rome ; d’autres "Compagnons" partent à travers toute l’Europe et jusqu’en Asie.

Ils se consacrent à l’éducation des enfants et des jeunes, à la formation spirituelle ; ils servent auprès des malades et des laissés pour compte aussi bien qu ’auprès de personnes ayant une influence dans la société.

Ignace meurt en 1556, inaugurant pour ses compagnons une nouvelle manière d’annoncer l’Evangile et d ’être présents dans le monde. Sa spiritualité anime également, aujourd’hui, des laïcs et des congrégations religieuses d’hommes et de femmes.

Ensemble, nous allons regarder comment, chacun(e) de nous peut grandir dans une plus grande proximité de Dieu, mais encore une fois chacun à notre manière, à la suite d’Ignace sans forcément appliquer à la lettre sur notre propre vie ce qu’il a vécu lui-même. Il ne s’agit pas pour nous de devenir des « clones » d’Ignace à force de répéter les exercices spirituels…mais bien pour chacun(e) de nous de devenir des saints uniques en notre genre.

2- Regardons Ignace dans la profondeur de son humanité, dans l’épaisseur de son humanité, dans la lourdeur de son humanité… Le corps est un part de l’identité de chacun(e), une vérité qui est unique pour chacun(e).
Regardons Ignace dans son existence profondément humaine…n’oublions pas trop vite tout ce qu’il a vécu dans son corps, dans sa chair…Le corps a toujours une grande place dans notre vie de la terre… Au cours de sa jeunesse, il a profité de tous les plaisirs de la vie.. il a cherché les honneurs, la gloire dans des actions très terre à terre… il a connu une blessure au cours d’une bataille (il a eu une jambe abîmée)… Et après sa conversion, il a vécu la mortification… il a mendié…il a vécu une très grande pauvreté…Il a vécu dans son corps quelque chose d’important de lui-même, de la profondeur de son être même…Par le corps, nous exprimons aussi nos sentiments les plus profonds : l’amour, la peur, la fête…Ignace ne s’en est pas privé. Il a éprouvé les Exercices Spirituels avec et dans son corps.
Et nous quelle place faisons nous à notre corps ? quelle importance lui accordons-nous ?Dans mon corps, j’ai peut-être vécu moi aussi des choses importantes ? Lesquelles ?Comment je le respecte ou le maltraite ? Je peux moi aussi connaître des handicaps ou des blessures…comment je les assume ?

3- Ignace était aussi un grand spirituel….il a accordé une place primordiale à son esprit…
Ignace a été habité par beaucoup de mouvements intérieurs, par une forte dynamique du désir ; il y avait aussi la force et le contraste des images qui peuplaient son imaginaire, l’expérience de la tristesse et de l’allégresse éprouvées "affectivement"
Ignace avait beaucoup de forces intellectuelles… il réfléchissait beaucoup…
L’origine du livre des Exercices spirituels est l’expérience de Dieu qu’Ignace de Loyola fait à l’âge de 31 ans à Manrèse, une petite bourgade proche de Barcelone. Depuis ce séjour, Ignace note régulièrement, dans un cahier, certaines choses qui peuvent être utiles à d’autres par la suite. Pendant une vingtaine d’années, Il ne cesse de reprendre et de compléter ses notes, rédigées en espagnol, jusqu’à leur donner à Rome,vers 1544, la forme achevée que nous leur connaissons actuellement.
Quels sont, pour moi, mes lieux de réflexion, de formation (humaine…chrétienne…) ? Les lieux où j’apprends à m’ouvrir aux autres ? Quelles sont mes lacunes ? Quelles sont mes attentes à ce niveau là ?

4- Ignace face à lui-même, face à sa vie…au cours de sa convalescence…il relit sa vie
Et moi face à ma propre vie… ?
Ignace, c’est quelqu’un qui a évolué dans sa vie…. Que nous sachions nous garder d’un regard définitif sur l’autre ! Il y a des regards qui font exister…d’autres qui tuent. Le regard définitif sur quelqu’un peut l’empêcher de vivre ou d’avancer,… car toute personne est un être en mouvement, un être qui évolue…Savoir regarder l’autre comme une personne qui se transforme…une personne toujours en devenir…

Ignace a vécu son enfance, sa jeunesse… sans se poser beaucoup de questions…. Il a vécu, « profité » de la vie…Il y a eu de nombreux événements marquants pendant cette première étape de sa vie…il a profité de tous les plaisirs du monde…en cherchant les honneurs terrestres…Il a même été impliqué dans des affaires un « peu troubles »… Et un jour par la force des évènements, il s’est retrouvé face à lui-même…il s’est mis à relire sa vie… « Qu’est-ce que je suis en train de faire de ma vie ? » Il s’est retrouvé face à lui-même…
Oser s’arrêter…oser se poser…prendre le temps de nous retrouver face à nous-mêmes….Prendre le temps de relire notre vie…pour y donner un sens…
Prendre un temps personnel pour nommer les événements marquants de ma vie…les étapes que j’ai franchies moi-même…

5- Ignace fait l’expérience de la rencontre du Christ avec la réalité de son existence : il n’a pas fui son existence…c’est toujours au cœur de nos vies, au cœur de nos engagements très particuliers que Dieu nous parle ; Ignace fait la rencontre de Dieu au cœur de sa vie telle qu’il est en train de la vivre…. Et il décide de vivre une plus grande intimité avec Lui…
Et moi, quelles sont les expériences de ma rencontre du Christ ?

Dans l’histoire de la Bible, des hommes et des femmes ont fait l’expérience de la rencontre de Dieu, et leur vie en a été profondément transformée. Evoquons :
  Moïse devant le buisson ardent …. (Exode 2,1 à 3,22)
  Marie, lors de l’Annonciation (Luc 1,26 – 56) : « Tu vas enfanter un enfant qui seras le Messie…le veux-tu ? »
  Saint Paul sur le chemin de Damas (Actes 9,1 - 19)
  Ignace de Loyola, lors de sa convalescence en lisant la vie de Jésus et des saints
  François d’Assise, dans l’église de saint Damien, devant la croix du Christ.
  Mère Térésa, au milieu des pauvres de Calcutta
  Etc…

Exode 2,1 à 3,22 : MOISE FACE AU BUISSON ARDENT

Moïse avait deux contemplations : - Celle de ses frères mal traités en Egypte (il les avait vus être maltraités et se battre entre eux) – Celle de Dieu présent dans un buisson qui ne se consume pas.
Deux contemplations qui s’éclairent l’une l’autre : Dans ce buisson qui brûle sans se consumer, nous voyons la vie qui peut être mal menée, dans le buisson comme chez les Hébreux, mais qui ne peut jamais être réduite en cendre. La vie des Hébreux brûlée par la dureté des Egyptiens ne pourra jamais être consumée ou anéantie. C’est Dieu qui, en habitant ce monde-là, lui donne une vie pour toujours. Et Moïse fait un détour pour voir ce Dieu là, pour mieux le connaître, pour mieux l’entendre, pour être plus proche de lui.
Alors, le désir de Moïse de voir ses frères plus heureux, devient le désir de Dieu : « J’ai vu la misère de mon peuple, dit Dieu… » Ensuite, le désir de Dieu devient le désir de Moïse : « Va libérer mon peuple… ». Moïse agira désormais au nom de Yahvé et non plus en son nom propre. Moïse s’est laissé habiter par Dieu
Yahvé livre son nom : « Je suis celui qui suis ». Désormais, le Dieu Très Haut, lointain, a un nom. Il devient ainsi un partenaire de l’Homme…quelqu’un de proche, quelqu’un à qui on peut parler, quelqu’un au nom de qui on peut agir, quelqu’un qu’on peut situer, quelqu’un au nom de qui Moïse est envoyé.
« Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». Par cet autre nom, Dieu est le Dieu des hommes, et pas seulement le Dieu du Ciel. « Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob » exprime une alliance forte…une alliance entre l’humanité et Dieu.
Présence de Dieu au cœur de nos vies.

L’Evangile s’écrit toujours sur le papier de notre vie…et avec l’encre de notre vie.

Méditation de Louis Morandeau
30 août 2008