Comme il est bon d’être ensemble cette nuit… parce que c’est la plus belle des nuits.
Nous sommes un peuple de nomades… et au milieu de nous Le Seigneur passe.
Un peuple de nomades qui s’est rassemblé autour du feu.
Nous avons quitté nos tentes et nos roulottes, celles de la vie quotidienne et peut-être celles de nos replis sur nous-mêmes, pour nous rassembler autour d’un feu dans la nuit. Dans la nuit pour ne pas se laisser distraire ni enchaîner par nos activités du jour ; autour d’un feu pour ne voir et sentir que le plus important, voire l’essentiel : le visage de nos frères éclairé par une lumière qui ne s’impose pas et qui réchauffe en même temps.
Ce moment exceptionnel nous fait sentir combien la lumière et la chaleur sont indispensables pour vivre ; elles nous font comprendre ce feu intérieur qui nous traverse parfois, ce désir de brûler d’amour.
Le Seigneur passe dans nos vies parfois comme un feu :
Les disciples d’Emmaüs ont été les premiers à faire cette expérience le soir de Pâques :
« Notre cœur n’était-il pas tout brûlant tandis qu’il nous expliquait les Écritures ? » (Lc 24, 31)
Et cette nuit, ne nous brûle-t-il pas le cœur également, comme il a brûlé le cœur de tous ceux qui se sont mis en route vers le baptême ? Je pense à tous les catéchumènes du monde qui sont baptisés cette nuit, et à tous ceux qui se sont mis en route pour l’être prochainement.
Un peuple de nomades qui s’est rassemblé autour du feu, mais aussi autour de la Parole.
Les gens du voyage se rassemblent autour d’un feu de camp pour se raconter des histoires, pour se raconter leur histoire, l’histoire de leur peuple.
C’est ce qu’on a fait ce soir. On est remonté aux origines : Dieu nous a créés, c’est le premier acte d’alliance, puis on s’est remémoré le Passage de la mer Rouge : Dieu a libéré son peuple, Dieu n’abandonne pas son peuple, Dieu nous veut libres. L’Alliance qu’il désire n’est pas une entrave à notre liberté, c’est la liberté-même qu’il nous offre.
Puis la Résurrection de Jésus a été proclamée, c’est l’Alliance nouvelle et éternelle signée jusque dans nos cœurs, inscrites dans nos vies quotidiennes.
Le Seigneur passe dans nos vies comme une Parole, comme la Parole qui relève, réchauffe, libère, encourage, nous ouvre, nous envoie. Une Parole qui ne retournera pas à son origine sans qu’elle nous ait fécondés, disait le prophète Isaïe. Cette parole nous a mis en route, elle vient approfondir notre propre parole : le oui de notre baptême, le oui que nous avons prononcé à Dieu et à nos frères.
Tout à l’heure nous renouvellerons les promesses de notre baptême.
Un peuple de nomades rassemblé autour d’un feu, de la Parole et qui va se rassembler dans un instant autour de l’eau.
C’est toujours près d’un point d’eau, un puits ou un fleuve que les peuples s’installent, que les villes se construisent, que les cultures se développent.
L’eau si nécessaire à nos vies : l’eau qui désaltère, qui lave, qui soigne… pas de vie sans eau.
Le Seigneur passe dans nos vies parfois comme une eau.
L’eau vive même : c’est la révélation faite à la Samaritaine, l’eau qui lave les yeux, c’est la révélation -au sens premier du mot- faite à l’Aveugle-né. Dans la Bible il est très souvent question d’eau, en commençant par la Création du monde, en passant par le déluge, le Passage de la Mer Rouge, l’eau qui jaillit du côté du Temple, l’eau du Jourdain dans laquelle Jésus a été baptisé, l’eau apaisée des tempêtes, l’eau changée en vin aux Noces de cana, l’eau du Lavement des pieds le Jeudi Saint, l’eau et le sang sortis du cœur de Jésus sur la Croix, et bien d’autres encore…Tout à l’heure, nous allons être aspergés de l’eau pascale.
Un peuple de nomades qui se rassemble autour du pain et du vin.
II n’y a pas de fêtes ou de rassemblements sans repas partagé. Le repas c’est ce qui nous relie les uns aux autres. C’est le symbole de la fraternité. Jésus l’avait bien compris, il a mangé et bu avec beaucoup de gens, y compris avec les moins fréquentables de son époque.
Le seigneur passe dans nos vies comme le pain et le vin.
Il vient combler notre faim et notre soif, il vient combler notre désir de fraternité, il vient nous relier les uns aux autres, il veut faire alliance avec chacun pour nous incorporer à son peuple. C’est ce qu’il a fait le soir du Jeudi Saint et c’est ce qu’il nous a dit de faire pour faire mémoire de lui, lui qui a passé sa vie à nous aimer en nous sauvant, à nous sauver en nous aimant jusqu’au bout.
Voilà pourquoi cette nuit est la plus belle des nuits. Elle célèbre le cœur de la foi chrétienne avec les éléments les plus essentiels de notre vie : le feu, la parole, l’eau, le pain et le vin, pour dire que le Christ est ressuscité. Oui, le Seigneur passe… il passe dans nos vies…Il est venu apporter le feu sur la terre, il est la parole de Dieu, il est l’eau vive et il a fait du pain et de vin son corps et son sang donnés pour la vie du monde.
Le Seigneur passe… au fait, savez-vous ce que veut dire le mot « Pâques » ? Ça veut dire « passage ». Que ces fêtes de Pâques nous entrainent dans son passage ! Soyons de ceux qui vivent de la résurrection du Seigneur pour en être les témoins.